Le 24 janvier 2017 à Tel Aviv manifestation de soutien au soldat franco-israélien Elor Azaria (Afp)
Le père du soldat franco-israélien Elor Azaria, accusé d'avoir achevé un
assaillant palestinien blessé, a imploré mardi à Tel-Aviv la clémence
du tribunal militaire qui juge son fils, lors d'un procès qui déchaîne
les passions.
Défense et accusation sont entrées dans le débat sur la peine que
devrait prononcer le tribunal au cours d'une audience ultérieure.
Les avocats du sergent de 20 ans ont fait déposer son père, son ancienne
maîtresse d'école, et surtout plusieurs de ses officiers et camarades
qui ont dressé de lui un tableau très éloigné du soldat exécutant
froidement un Palestinien.
Après plusieurs mois d'un procès exceptionnel, Elor Azaria, qui a aussi
la nationalité française, a été reconnu coupable d'homicide volontaire
le 4 janvier.
Premier soldat franco-israélien condamné pour homicide volontaire depuis
2005 selon la presse, il encourt vingt ans de prison. Les réquisitions
de l'accusation, initialement attendues mardi, risquaient d'être
reportées à une autre date.
Le soldat, membre d'une unité paramédicale, avait été filmé le 24 mars
2016 par un militant propalestinien alors qu'il tirait une balle dans la
tête d'Abdel Fattah al-Sharif à Hébron, en Cisjordanie occupée.
Le Palestinien venait d'attaquer des soldats au couteau. Atteint par balles, il gisait au sol, apparemment hors d'état de nuire.
Le père d'Elor Azaria, Charlie, a décrit les mois de procès et d'attention publique comme une épreuve très difficile.
"Cette punition de 10 mois, cela suffit. Cela fait 10 mois que nous ne
vivons plus, nous souffrons. Après tout ce que j'ai donné au pays, c'est
de l'abus physique et psychologique", a dit, en sanglots, celui qui est
venu vivre en Israël en 1975 et qui a servi 33 ans dans la police.
Charlie Azaria, une ancienne enseignante du soldat, des officiers et
camarades ont parlé d'un garçon respectueux, attentif aux autres,
constamment prêt à aider et ayant toujours rêvé d'unité combattante.
"Dans les opérations les plus dures, on le choisissait lui, le meilleur
paramédic' de l'unité", a témoigné un de ses anciens officiers sous
couvert de l'anonymat.
Elor Azaria pourrait avoir craqué sous la pression, ont signifié les
témoins. Les Territoires palestiniens, Jérusalem et Israël étaient alors
en proie à des violences quasi-quotidiennes.
Cela "aurait pu arriver à n'importe lequel d'entre nous", a dit en
pleurs Ori Elon, un soldat de son unité, "soyez indulgents. Au bout du
compte, on est des soldats, on s'occupe des autres, on est confronté à
des situations difficiles".
A l'extérieur du tribunal, une cinquantaine de sympathisants, tenus à
distance par des policiers, ont rappelé combien l'affaire divise
l'opinion, entre ceux qui défendent le procès au nom du respect
nécessaire de valeurs éthiques par l'armée et ceux qui invoquent le
soutien dû aux soldats confrontés aux attaques palestiniennes.
"Voilà un soldat qui a tué un terroriste pour nous protéger", a dit l'un
des leaders du rassemblement, Ran Buzaglo, auprès d'une banderole
proclamant: "Le peuple soutient et salue le soldat et héros Elor
Azaria".
Elor Azaria a plaidé non coupable. Il pensait que le Palestinien
dissimulait sous ses vêtements une ceinture d'explosifs, ont expliqué
ses avocats. Mais la cour a jugé le 4 janvier qu'Abdel Fattah al-Sharif
avait été tué "inutilement".
Dans pays où l'armée est réputée comme un facteur d'unité face aux
menaces extérieures, les messages haineux s'étaient multipliés sur les
réseaux sociaux contre les juges militaires.
Le jugement a aussi suscité une multiplication d'appels à gracier le
soldat de la part de personnalités politiques, à commencer par le
Premier ministre Benjamin Netanyahu.
L'affaire a mis à l'épreuve l'incontournable institution qu'est l'armée,
dont l'état-major, bravant la réprobation d'une grande partie de la
droite dominante, a poussé à ce qu'Elor Azaria soit jugé.
Les conséquences se sont fait sentir après l'attentat au cours duquel un
Palestinien a lancé son camion contre des soldats israéliens et tué
quatre d'entre eux, le 8 janvier à Jérusalem.
L'armée a alors dû s'employer à faire taire une bruyante campagne selon
laquelle les soldats avaient été victimes d'un "effet Azaria" et avaient
tardé à tirer sur le Palestinien de peur de se retrouver dans la
situation du sergent.
(25-01-2017)
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