Les miliciens chiites ont consolidé leur emprise sur le pouvoir au
Yémen, un pays à majorité sunnite de la Péninsule arabique, en annonçant
la dissolution du Parlement et la mise en place de nouvelles instances
dirigeantes dans le pays, privé d'exécutif depuis deux semaines. Le
Yémen, allié des États-Unis dans la lutte contre al-Qaida, est plongé
dans une profonde crise politique depuis la démission le 22 janvier du
président Abd Rabbo Mansour Hadi et de son gouvernement, deux jours
après la prise du palais présidentiel par les miliciens chiites, dits
houthis. Dans une "déclaration constitutionnelle" rendue publique depuis
le palais présidentiel, la milice houthie a décidé de dissoudre le
Parlement, d'installer un Conseil présidentiel de cinq membres à élire
par un Conseil national de 551 membres devant remplacer la Chambre
dissoute.
Le Conseil présidentiel doit à son tour former un gouvernement de
compétences nationales pour une période de transition, que la milice a
fixée à deux ans. Durant cette période, les nouvelles instances
dirigeantes auront pour mission d'élaborer une nouvelle Constitution à
soumettre à référendum et d'organiser des élections législatives et
présidentielle, selon le texte. Le document porte la signature du
"président du Comité révolutionnaire, Mohamed Ali al-Houthi", un parent
du chef de la milice chiite d'Ansaruallah, Abdel Malek al-Houthi. Ce
Comité révolutionnaire "entreprendra toutes les mesures et les
dispositions nécessaires pour défendre la souveraineté de la patrie,
assurer sa stabilité et sa sécurité et garantir les droits et les
libertés des citoyens", indique encore le document. C'est également le
Comité révolutionnaire qui fixera ultérieurement "les compétences du
Conseil national, du Conseil présidentiel et du gouvernement", poursuit
le texte.
La "déclaration constitutionnelle" a été lue lors d'une cérémonie à
laquelle assistaient des figures tribales et militaires, mais aussi les
ministres de la Défense et de l'Intérieur du dernier gouvernement, qui a
démissionné il y a deux semaines, le même jour que le président Hadi.
Étaient également présentes des figures politiques proches de
l'ex-président Ali Abdallah Saleh, qui a quitté le pouvoir en février
2012 sous la pression de la rue, et présenté désormais comme un allié
des houthis. M. Saleh dirige toujours le plus grand parti politique du
Yémen, le Congrès populaire général (CPG), majoritaire dans l'actuelle
chambre des députés. Il est resté également influent dans le pays,
notamment dans les milieux de tribus et de l'armée.
Alors que les houthis ont appelé la population à célébrer en soirée
cette annonce dans les rues de Sanaa, étroitement contrôlées par leurs
miliciens en armes, un groupe de jeunes militants, animateurs du
soulèvement en 2011 contre M. Saleh, a rejeté dans un communiqué
"l'hégémonie des milices houthies" sur le pays. Des tribus de Marib, une
province riche en hydrocarbures, ont exprimé leur rejet. "Nous refusons
les auteurs du coup d'État à Sanaa", a déclaré à l'AFP cheikh Saleh
al-Anjaf, un porte-parole de ces tribus.
La "déclaration constitutionnelle", qui ne fait aucune référence au
président Hadi, a été annoncée au lendemain de la suspension des
négociations entre les différentes formations politiques sur une sortie
de crise, parrainées par l'émissaire de l'ONU au Yémen, Jamal Benomar,
faute d'accord. Ces négociations devaient reprendre samedi, selon des
participants. M. Benomar, qui n'a pas réussi à rapprocher les positions
des principaux protagonistes de la crise, a quitté Sanaa vendredi en fin
d'après-midi au terme d'une mission de deux semaines au Yémen, a
rapporté l'agence officielle Saba peu avant l'annonce des miliciens
chiites de leur nouveau coup de force.
L'émissaire onusien s'est envolé pour l'Arabie saoudite, le puissant
voisin du Yémen, a-t-on appris dans son entourage. Les miliciens
chiites, dont le fief se trouve dans le nord du pays, sont entrés dans
la capitale en septembre. Ils ont depuis pris le contrôle de nombreux
bâtiments gouvernementaux par la force, poussant l'exécutif à la
démission. Parallèlement, ils ont étendu leur influence vers le centre
du pays, se heurtant notamment à des tribus sunnites locales et à des
combattants d'al-Qaida.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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