L'opposition à Bahreïn a appelé à manifester pour marquer samedi le
quatrième anniversaire d'un soulèvement qui a profondément polarisé ce
pays allié des Etats-Unis, seule monarchie du Golfe à avoir été autant
ébranlée par les secousses du Printemps arabe.
La Coalition du 14 février, un mouvement de jeunesse très actif sur
internet, a appelé à des manifestations et des grèves dans tout le pays.
Le chef de la sécurité publique, le général Tariq al-Hassan, a invité la
population à "se tenir éloignée de toute activité susceptible de causer
des troubles et de menacer la sécurité ou l'ordre public".
Dans un communiqué, il a averti que le simple fait d'appeler les gens à
se joindre aux manifestations serait considéré comme un crime. "Des
mesures seront prises contre ceux qui sèment la terreur parmi les
citoyens et résidents, mettent en péril la sécurité d'autrui ou tentent
de mettre à mal la sécurité ou la stabilité de la nation", a-t-il
menacé.
Peu après le début du soulèvement le 14 février 2011, dans la foulée du
Printemps arabe, la dynastie sunnite de ce petit royaume avait écrasé
dans le sang et avec le soutien militaire de l'Arabie saoudite, les
protestations menées par la majorité chiite.
Bahreïn, située sur le Golfe en face de l'Iran chiite, accueille sur son
territoire la 5e flotte américaine. Il est aussi l'un des pays arabes à
soutenir la campagne aérienne menée par Washington contre
l'organisation jihadiste Etat islamique.
Les tensions restent vives dans le royaume, où les divisions
confessionnelles s'exacerbent à mesure que se creuse le fossé entre le
gouvernement dominé par la minorité sunnite et l'opposition menée par
les chiites.
Cette opposition réclame la mise en place d'une monarchie réellement
constitutionnelle, avec un Premier ministre élu, indépendant de la
famille royale.
Mais la dynastie des Al-Khalifa a jusqu'ici refusé de céder.
Le chef de l'opposition chiite, cheikh Ali Salman, est accusé d'avoir tenté de renverser le régime, et a été emprisonné.
Son arrestation le 28 décembre, peu après sa reconduction à la tête du
principal parti d'opposition bahreïni, Al-Wefaq, a déclenché des
manifestations quasi quotidiennes dans des villages chiites.
Les attaques visant les forces de sécurité ont augmenté.
"Le mouvement a atteint sa quatrième année avec une situation qui ne
fait qu'empirer et se détériorer, et des citoyens menacés de perdre leur
nationalité d'un jour à l'autre", estime le Wefaq sur Twitter.
Les autorités de Bahreïn ont retiré la nationalité à des dizaines
d'opposants ces dernières années, déclenchant des condamnations de
défenseurs des droits de l'Homme.
En octobre, un tribunal a interdit pendant trois mois le parti al-Wefaq pour des manquements à la loi sur les associations.
"Il semble y avoir peu d'espoir de progrès à Bahreïn. L'opposition est
tout juste légale", analyse Neil Partrick, expert du Golfe pour un
centre de réflexion britannique, l'Institut royal pour les études de
défense et de sécurité.
Les rivaux politiques ont peiné à dépasser leurs divergences dans le
cadre d'un dialogue national qui a capoté en dépit de plusieurs rounds
de négociations.
Al-Wefaq a refusé de reprendre les discussions avec les autorités en
septembre dernier, malgré une nouvelle proposition mise sur la table par
le prince héritier Salman ben Hamad Al-Khalifa.
En novembre, l'opposition a boycotté des élections législatives qui ont
été remportées par des sunnites favorables au gouvernement.
Al-Wefaq a décrit le 14 février 2011 comme "le début d'un mouvement
pacifique (...) réclamant une démocratie". Il a insisté sur le fait que
les protestations "pacifiques" doivent continuer "jusqu'à ce qu'une
solution politique soit trouvée".
Mais une telle solution semble lointaine dans le plus petit pays du
Golfe, voisin de la monarchie saoudienne, pôle d'influence majeur dans
la région.
"Bien qu'ils aient montré un certain intérêt dans les pourparlers
internes à Bahreïn, les dirigeants saoudiens semblent laisser les
éléments les plus conservateurs au sein de la famille régnante bahreïni
décider des orientations politiques du pays", estime M. Partrick.
Lundi, Manama a ordonné la fermeture permanente de la chaîne de
télévision Alarab du milliardaire saoudien Al-Walid ben Talal, qui avait
donné la parole à un opposant chiite bahreïni dès son premier journal
d'informations.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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