Les ambassadeurs des cinq pays membres permanents du Conseil de
sécurité (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie et Chine) examinent
mercredi à New York un projet britannique de résolution sur la Syrie.
Cette résolution ouvrirait la voie à un recours à la force contre le
régime syrien, accusé d’avoir utilisé des armes chimiques, mais devrait
se heurter à l’opposition de Moscou qui exige un rapport des enquêteurs
de l’ONU avant toute décision.
Le Premier ministre syrien, Waël al-Halqi, a prévenu les pays
occidentaux que son pays serait le "cimetière des envahisseurs" en cas
d’intervention militaire.
"La Syrie (...) va surprendre les agresseurs comme elle les a surpris
pendant la guerre (israélo-arabe) d’Octobre (1973) et sera le cimetière
des agresseurs", a indiqué le Premier ministre cité par la télévision
d’Etat.
Selon un haut responsable américain, les Etats-Unis, qui accusent le
régime de Bashar al-Assad d’une attaque meurtrière au gaz toxique le 21
août près de Damas, écartent une action militaire unilatérale et ont
discuté avec leurs alliés d’éventuelles frappes qui pourraient durer
plus d’un jour.
"Le Royaume-Uni a rédigé une résolution condamnant l’attaque à l’arme
chimique par (le président) Assad et autorisant les mesures nécessaires
pour protéger les civils", a annoncé le Premier ministre britannique
David Cameron sur Twitter.
Mais la Russie, qui a bloqué avec la Chine par le passé plusieurs
résolutions menaçant de sanctions le régime syrien, a jugé "inopportun"
une telle réunion avant que les inspecteurs de l’ONU en Syrie n’aient
présenté leur rapport sur l’attaque chimique présumée.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a également mis en garde
contre une frappe, évoquant un risque de "déstabilisation supplémentaire
de la situation dans le pays et la région", tandis que le Guide suprême
iranien Ali Khamenei, dont le pays est un autre allié de Damas, jugeait
qu’une action militaire "serait un désastre pour la région".
Ces dernières heures, les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne
notamment s’étaient déclarés prêts à agir, non pas pour renverser le
régime syrien, mais pour le "dissuader" d’avoir de nouveau recours à des
gaz toxiques.
Le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague avait même
estimé lundi qu’une action serait possible sans aval du Conseil de
sécurité. Mais plusieurs pays, dont l’Italie et la Norvège, se sont dits
opposés à toute intervention en l’absence de mandat de l’ONU.
L’envoyé spécial de la Ligue arabe et de l’ONU, Lakhdar Brahimi, a lui-même averti que le feu vert du Conseil était nécessaire.
Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a appelé de son côté
les membres du Conseil de sécurité "à s’unir afin d’agir pour la paix"
en Syrie, en condamnant l’utilisation en général des armes chimiques
mais sans se prononcer sur l’opportunité d’une frappe.
M. Cameron et le président américain Barack Obama n’ont "aucun doute sur
la responsabilité du régime" syrien dans l’"attaque chimique"
meurtrière, a déclaré Downing Street, pour justifier une éventuelle
intervention.
Le gouvernement américain doit rendre publique cette semaine une partie
d’un rapport des services de renseignement étayant la responsabilité du
régime.
Selon le magazine américain Foreign Policy, la conviction américaine se
base notamment sur l’interception de conversations téléphoniques entre
un responsable du ministère syrien de la Défense et le chef de l’unité
des armes chimiques.
Un haut responsable américain a souligné que si les Etats-Unis
n’intervenaient pas militairement, cela enverrait un dangereux signal
aux autres régimes disposant de stocks d’armes chimiques, notamment la
Corée du Nord.
Il n’a néanmoins pas voulu préciser si le plan d’attaque prévoyait
d’aller au-delà de l’utilisation de missiles de croisière et s’il
nécessiterait d’envoyer des avions de combat dans l’espace aérien
syrien.
Le président français François Hollande s’est dit lui aussi "prêt" à
intervenir militairement pour "punir" Damas qui a "gazé" son peuple. Le
Parlement français est convoqué mercredi prochain pour une session
extraordinaire.
Selon Ahmad Ramadan, dirigeant de la Coalition de l’opposition, une
éventuelle frappe est une "question de jours" et parmi "les cibles
éventuelles" figurent des aéroports, bases militaires et dépôts d’armes.
Des discussions ont eu lieu à ce sujet selon lui entre la Coalition,
les rebelles et des "pays alliés".
Le régime syrien, qui affirme n’avoir "jamais utilisé d’armes
chimiques", a averti qu’il se défendrait en cas de frappe. "Nous avons
des moyens de défense qui vont surprendre", a affirmé le ministre des
Affaires étrangères Walid Mouallem.
Mais à Damas, la perspective d’une intervention a semé la peur. "Ma mère
est terrifiée, car nous vivons tout près du siège de l’état-major et
ça, c’est une vraie cible", a déclaré à l’AFP Mohammad, 35 ans.
Le représentant de la Syrie à l’ONU, Bashar al-Jaafaria, a accusé les
rebelles d’avoir "utilisé des armes chimiques dans le but d’entraîner
une intervention militaire étrangère".
Sur le terrain, après une suspension de leur mission la veille pour des
raisons de sécurité, les experts de l’organisation ont repris leur
travail mercredi matin dans la Ghouta orientale, près de Damas, selon le
conseil militaire local des rebelles qui a assuré qu’ils étaient sous
sa protection.
Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a indiqué mercredi
que les experts nécessitaient quatre jours pour achever leur travail
sur place.
Selon l’opposition, le régime a utilisé le 21 août des gaz toxiques à
Muwadamiyat al-Cham et dans la Ghuta orientale, deux régions contrôlées
par les rebelles à l’ouest et à l’est de Damas, tuant des centaines de
personnes.
Lundi, les experts s’étaient rendus à Muwadamiyat al-Cham, où ils avaient
effectué, selon l’ONU, une collecte "productive" de preuves, malgré des
conditions de travail "difficiles", leur convoi ayant dans un premier
temps essuyé des tirs de snipers.
Les rebelles ont pour leur part affirmé mercredi avoir tiré des
roquettes sur le centre de Damas, ajoutant qu’il s’agit de
"représailles" à l’attaque chimique imputée au régime, alors que des
combats violents faisaient rage près de la capitale.
L’armée israélienne continuait par ailleurs à se préparer à
l’éventualité d’une intervention militaire en Syrie qui pourrait
déborder à la frontière nord d’Israël.
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L’Otan condamne les armes chimiques, mais reste en marge d’une éventuelle opération
L’Otan a jugé mercredi "inacceptable" l’usage d’armes chimiques en Syrie
par le régime de Bashar el-Assad et a estimé qu’il ne pouvait pas
rester sans réponse, même si une intervention directe de l’Alliance
atlantique n’est pas à l’ordre du jour, selon une source diplomatique.
"Nous condamnons dans les termes les plus forts les attaques
scandaleuses" survenues le 21 août dans la région de Damas, a déclaré
dans un communiqué le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh
Rasmussen.
"Les informations disponibles, issues d’un grand nombre de sources,
désignent le régime syrien comme responsable de l’utilisation d’armes
chimiques lors de ces attaques", a ajouté Anders Fogh Rasmussen, qui
s’exprimait à l’issue d’une réunion à Bruxelles des ambassadeurs de
l’Otan consacrée à la situation en Syrie. Il a aussi souligné que le
régime de Damas "dispose d’un stock d’armements chimiques".
"Tout usage de telles armes est inacceptable et ne peut pas rester sans
réponse. Ceux qui en sont responsables devront rendre des comptes", a
ajouté le secrétaire général de l’Otan, alors que Paris, Londres et
Washington, trois des membres les plus importants de l’Otan, semblent
préparer une action armée contre Damas. "Nous considérons l’utilisation
d’armes chimiques comme une menace pour la paix et la sécurité
internationales", ajoute Anders Fogh Rasmussen, ce qui pourrait
justifier une intervention étrangère au regard du droit international.
"Nous continuerons les consultations et à examiner de très près la
situation en Syrie", a ajouté le secrétaire général de l’Otan.
Toutefois, la discussion mercredi des ambassadeurs des 28 États membres
est restée très générale et n’a pas porté sur une éventuelle implication
de l’Otan dans une opération en Syrie, a indiqué un diplomate. "Ce
n’est clairement pas à l’ordre du jour", a assuré cette source ayant
requis l’anonymat.
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La Syrie accuse l’Occident d’avoir encouragé les rebelles à utiliser du gaz sarin
Le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Fayçal Meqdad a accusé
l’Occident d’avoir encouragé les rebelles à utiliser du gaz sarin à
plusieurs reprises en Syrie. "Les groupes terroristes (terme désignant
les rebelles dans la terminologie officielle) ont fait usage de gaz
sarin dans plusieurs points du pays (...), avec les encouragements
américain, britannique et français", a-t-il dit aux journalistes.
Parlant aux journalistes à la fin de son entretien à l’hôtel Four
Seasons de Damas avec la responsable de l’ONU pour le désarmement Angela
Kane, le ministre syrien a mis ces pays en garde. "Il faut que cessent
les encouragements de ces pays occidentaux, car en défendant ces
terroristes et en adoptant leurs propos, ces groupes retourneront
prochainement les armes chimiques contre les peuples d’Europe."
Angela Kane se trouve à Damas en compagnie d’experts des Nations unies
qui enquêtent sur une attaque présumée aux armes chimiques le 21 août
près de Damas. Auparavant, l’ambassadeur de Syrie à l’ONU Bashar
el-Jaafari avait affirmé dans une interview reprise mercredi par
l’agence Sana que "beaucoup de données (tendaient) à prouver l’innocence
du gouvernement syrien" et avait dénoncé "une accusation fallacieuse".
Ces données prouvent également que les "groupes armés ont utilisé des
armes chimiques dans le but d’entraîner une intervention militaire
étrangère et une agression contre la Syrie", a assuré l’ambassadeur.
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