Des Algériennes portant le "haïk" participent à une manifestation, le 21 mars 2013 à Alger
AFP - Beatrice Khadige
"Vive l'Algérie algérienne" : voilées des pieds à la tête tout en
blanc, le visage partiellement masqué d'un petit triangle brodé, des
femmes ont défilé jeudi à Alger pour promouvoir leur tenue
traditionnelle.
"Nous voulons balayer ces vêtements qui nous
viennent d'Arabie saoudite, noirs, tristes et étouffants au soleil pour
revenir à notre traditionnel 'Haïk' qui fait la fierté de la femme
algérienne", proclame l'une d'elles, la cinquantaine, insistant pour
garder l'anonymat, en posant devant la Grande Poste.
Le cortège,
un workshop organisé par une étudiante des Beaux-Arts, Souad, a
rassemblé une trentaine de participantes parties à pied du coeur de la
Casbah jusqu'à la Grande Poste où elles se sont dévoilées tout sourire.
"Je
voulais donner au 'Haïk' sa valeur véritable et j'en suis à mon second
essai", avoue Souad, une artiste-peintre tête nue au quotidien, mais qui
veut défendre bec et ongles la tradition du pays.
"Vive l'Algérie
algérienne, ça fait partie de notre culture, la chose noire, ça nous
est totalement étranger", approuve une passante la tête recouverte,
elle, d'un foulard bordeaux.
Pour Rim, la vingtaine, employée dans
un site culturel, visage masqué par le 'Aadjar' (le petit triangle) en
soie brodé main de la grand-mère d'une amie, "c'est malheureux d'avoir
imposé depuis les années 90 le hijab qui ne fait pas partie de nos
traditions", un foulard noir assorti d'un manteau long de couleur
foncée.
"Certes, reconnaît-elle, le Haïk est d'origine turque,
mais il nous accompagne depuis des siècles (l'empire Ottoman a occupé
une bonne partie de l'Algérie avant d'en être chassé par les Français)".
Aujourd'hui dans Alger, on ne voit plus guère que des vieilles dames revêtues de ce vêtement traditionnel.
Et
souvent les petits triangles apposés sur le visage sont des joyaux de
dentelles brodées main. Parmi cette multitude de tenues, de couleur
blanche à blanc cassé, les plus aisées sont reconnaissables à la soie
qui les drape.
Amal, la trentaine, coiffée d'un foulard noir,
observe de loin la marche des femmes tout en blanc, applaudies par les
badauds, en souriant. "Oui", dit-elle à l'AFP, elle porterait "bien le
Haïk s'il revenait à la mode mais il n'y a que les vieilles qui le
mettent maintenant".
Les jeunes Algéroises, après avoir vécu tête
découverte, ont majoritairement mis le voile sous la pression des
islamistes durant la guerre civile dans les années 1990.
C'est
ensuite devenu un phénomène de mode pour certaines: les voiles sont de
toutes les couleurs et prennent toutes sortes de plis à condition de
masquer les cheveux et le cou. Nombre de jeunes femmes ne se privent
d'ailleurs pas de maquillage vif alors qu'elles sont censées, cachant
leur chevelure, ne pas attirer le regard masculin.
Par opposition
est apparu depuis la guerre civile la tenue très sévère du Niqab: une
femme se retrouve toute de noir recouverte: robe longue, gants, bas
opaques, voile sur la tête. Seuls les yeux sont visibles.
"Le
Hijab et le Niqab ne font pas partie de nos traditions", affirme Souad,
pour laquelle également "le Haïk met en valeur la femme d'aujourd'hui,
tout en légèreté et élégance".
En ce cinquantenaire d'indépendance
algérienne, Abdelkader Achour, président d'une association de défense
des traditions, Al Hadriah (La Citadine), rappelle que le "Haïk" est une
valeur révolutionnaire.
"La femme algérienne a été porteuse de
bombes et de mitraillettes sous ce Haïk. C'est elle qui traversait les
rues portant d'un point à l'autre ces armes contre le colonisateur
français", dit-il. Les soldats français fouillaient les hommes mais ne
touchaient pas aux femmes.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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