Un Airbus d'Emirates sur le tarmac de l'aéroport de Los Angeles, le 30 janvier 2017 (Afp)
Les Etats-Unis ont annoncé mardi l'interdiction des ordinateurs
portables et tablettes en cabine des avions de neuf compagnies aériennes
en provenance de pays arabes et de Turquie, invoquant un risque
d'attentats "terroristes" dans un contexte de durcissement de la
politique migratoire.
Ankara a rapidement réagi, le ministre turc des Transports Ahmet Arslan
demandant "de revenir en arrière ou d'alléger" cette mesure en invoquant
notamment l'impact potentiel sur l'afflux de passagers.
Des compagnies telles que Emirates ou Turkish Airlines assurant des vols
directs depuis Dubaï ou Istanbul vers les Etats-Unis ont 96 heures à
compter de mardi 07H00 GMT pour interdire à leurs passagers d'embarquer
avec des appareils électroniques plus gros qu'un téléphone portable.
Tous ces appareils (ordinateurs portables, tablettes, consoles de jeux,
liseuses, lecteurs de DVD, appareils photos…) devront être placés dans
les bagages en soute des avions, ont indiqué des responsables
américains.
"L'examen de renseignements indique que des groupes terroristes
continuent de viser le transport aérien et cherchent de nouvelles
méthodes pour perpétrer leurs attentats, comme dissimuler des explosifs
dans des biens de consommation", a expliqué l'un d'eux. "Sur la base de
ces informations", le secrétaire à la Sécurité intérieure John Kelly a
"décidé qu'il était nécessaire de renforcer les procédures de sécurité
pour les passagers au départ direct de certains aéroports et à
destination des Etats-Unis", a ajouté un autre responsable, sans dire de
quels renseignements précis Washington disposait.
D'après la télévision CNN, citant un cadre de l'administration de Donald
Trump, cette décision serait liée à une menace émanant d'Al-Qaïda dans
la péninsule arabique (AQPA), la branche du groupe jihadiste au Yémen.
Un ancien responsable de l'agence de sécurité dans les transports (TSA),
Tom Blank, pense, lui, que c'est une "réponse à des données précises de
renseignements portées à l'attention des autorités américaines", mais
que ces mesures seront "très probablement provisoires".
A compter de samedi donc, une cinquantaine de vols quotidiens de neuf
compagnies aériennes (Royal Jordanian, EgyptAir, Turkish Airlines, Saudi
Airlines, Kuwait Airways, Royal Air Maroc, Qatar Airways, Emirates et
Etihad Airways) seront affectés au départ de dix aéroports
internationaux: Amman, Le Caire, Istanbul, Jeddah, Ryad, Koweït, Doha,
Dubaï, Abou Dhabi et Casablanca.
Huit pays sont concernés, tous alliés ou partenaires des Etats-Unis: la
Jordanie, l'Egypte, la Turquie, l'Arabie saoudite, le Koweït, le Qatar,
les Emirats arabes unis et le Maroc.
"Nous estimons que c'est la bonne chose à faire et aux bons endroits
pour assurer la sécurité des voyageurs", a justifié un haut responsable
américain.
Il a invoqué "plusieurs incidents et attentats couronnés de succès
contre des passagers et des aéroports ces dernières années", citant
l'attaque revendiquée en février 2016 par les islamistes somaliens
shebab affiliés à Al-Qaïda: un engin avait explosé à bord d'un Airbus
A321 de Daallo Airlines, avec 74 passagers à bord, 15 minutes après le
décollage de l'appareil de Mogadiscio, provoquant un trou d'un mètre de
diamètre dans son fuselage et tuant le poseur présumé de la bombe.
Du côté de l'opposition démocrate au président Trump, l'élu Adam Schiff,
membre de la commission du Renseignement de la Chambre des
représentants, a apporté son "soutien complet" à l'interdiction
d'appareils électroniques: "Ces mesures sont à la fois nécessaires et
proportionnées à la menace. Nous savons que des organisations
terroristes veulent abattre des aéronefs", a-t-il commenté dans un
communiqué.
Washington avait informé au préalable les gouvernements et les
compagnies aériennes concernés et certaines avaient dévoilé lundi soir
sur Twitter quelques informations à destination de leurs clients.
La grande compagnie du Golfe, Emirates, a précisé que les restrictions
"entreront en vigueur le 25 mars et resteront valables jusqu'au 14
octobre 2017".
Turkish Airlines a informé ses passagers "que tout appareil électronique
ou électrique plus grand qu'un téléphone portable ou smartphone (à
l'exception des appareils médicaux) ne devait pas être transporté à bord
de vols à destination" des Etats-Unis.
Les responsables américains n'ont, eux, pas donné d'échéance à
l'interdiction mais ils ont prévenu: si les mesures ne sont pas mises en
oeuvre, les compagnies aériennes pourraient perdre leurs droits de
voler vers les Etats-Unis.
La décision s'inscrit dans un contexte de resserrement des contrôles aux
frontières et plus généralement de la politique américaine en matière
d'immigration depuis l'entrée en fonctions de Donald Trump. Le président
républicain essaie d'imposer une interdiction temporaire d'entrée aux
Etats-Unis aux ressortissants de six autres pays majoritairement
musulmans ainsi qu'à tous les réfugiés. Cette interdiction est contenue
dans un décret migratoire qui a été bloqué à deux reprises par des juges
fédéraux américains.
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