Ali Sammuneh, un scientifique syrien d'Alep à l'observatoire de Paris le 23 mars 2017 (Afp)
Forcé de fuir "l'enfer" d'Alep, l'astrophysicien syrien Ali Sammuneh
bénéficie d'un programme gouvernemental d'aide aux réfugiés à
l'Observatoire de Paris, devenu "sa maison" où il tente "pour ses
enfants" de se reconstruire une vie.
"J'ai été licencié en avril 2015, sans raison, juste parce que j'avais
été désigné comme +opposant au régime+", explique l'ancien maître de
conférences à l'université de génie civil d'Alep.
Privé de tous ses droits, de tout revenu et sachant "par expérience",
que son licenciement serait suivi d'une arrestation, le scientifique de
44 ans décide de fuir le pays. "Je devais faire le choix de l’avenir et
de la vie pour mes enfants", explique-t-il.
Pourtant en 2011, quand les manifestations pacifiques contre Bashar
al-Assad ont gagné le pays, il y a cru. L'homme discret avoue s'être mis
à rêver "d'un pays où les gens peuvent exprimer leurs idées, où le
président n'est pas un dieu".
Mais dès 2014, ses espoirs sont douchés. "Au départ, c'était un combat
du peuple syrien pour la démocratie puis les milices étrangères ont
apporté leur combat, un combat contre le peuple syrien", regrette ce
père de quatre enfants qui dit ne toujours pas comprendre que des
"hommes aient détruit et laissé détruire une ville entière avec des
femmes et des enfants".
"On ne savait même plus pourquoi les gens mourraient", raconte-t-il d'une voie calme, sans la moindre haine.
Une fois en Turquie, Ali Sammuneh appelle au secours son ami Florent
Deleflie, un astronome français avec qui il avait fait son DEA à
l'Observatoire de Paris en 1999, poussé par "leur profonde amitié", le
respect mutuel qui les unissait.
"J’adhère pleinement aux valeurs que défend Ali, et il m’offre la
possibilité de le montrer", explique Florent Deleflie qui décrit son ami
comme étant "un exemple", souriant, plein d'humour et "très gourmand".
Ali Sammuneh se rappelle, ému, son arrivée à l'aéroport de Roissy avec
sa femme et ses enfants. Florent Deleflie, "son ange gardien", et une
autre collègue étaient là avec "du chocolat et des livres pour les
enfants". "C'est un geste que je n'oublierai jamais". Une attention qui
lui a permis de ne pas se sentir comme "Armstrong sur la lune".
Mais ce docteur en dynamique des systèmes gravitationnels, au français
très riche, peine à trouver un emploi de chercheur même avec un DEA et
une thèse faits en France.
La réputation d'un scientifique est fondée sur la publication de
résultats importants et "on ne fait pas de recherche emprisonné dans une
ville en guerre. En Syrie la recherche est au niveau 0".
Depuis mars et pour un an, Ali Sammuneh bénéficie du programme PAUSE mis
en place par le gouvernement pour insérer des scientifiques réfugiés au
sein des établissements français. "Avoir un travail m'aide à me
reconstruire une vie".
Mais il regrette, que dans nos sociétés, on traite parfois les réfugiés
"comme des terroristes, comme des étrangers qui ne sont pas désirables".
"Cela complique notre vie, ici et ailleurs". Il voudrait de les gens
comprennent que les Syriens qui prennent la route de l'exil y sont
forcés.
"Ali a gardé son sourire généreux malgré tout ce qu’il a vécu", raconte
son collègue de l'Observatoire de Paris. "Ma crainte aujourd’hui est que
ce soit finalement l’état de la société française qui finisse par
+abîmer+ sa famille", ajoute-t-il.
Le but ultime du Syrien reste de retourner dans son pays. "La Syrie,
c'est comme ma mère, je ne peux pas la laisser tomber. Ce sera un devoir
de la reconstruire".
Mais quand ? se demande-t-il. "Je ne vois que le chaos". Les Iraniens,
les Turcs, les Russes ... ont-ils la volonté d'aider les Syriens a
reconstruire leur pays ou "considèrent-ils mon pays comme un gâteau à se
partager ?", s’interroge-t-il.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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