vendredi 10 mai 2013

Liban : « Je chante pour renaître » (Yolla Khalifé)

«  Aah...Aah  »
de Yolla Khalifé
Séance-dédicace à la librairie de l’Institut du monde arabe
1 Rue des Fossés Saint-Bernard, 75005 Paris
Samedi 18 mai 2013
de 16h00 à 18h00

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Aujourd’hui on retrouve dans les bacs, pour des complaintes douces comme des berceuses, sur les sillons d’un nouveau CD, la voix de Yolla Khalifé. Une voix dure aux tendresses râpeuses. Un CD qui a pour titre « Aah...Aah  ».

La famille Khalifé dans le giron de la musique. Marcel, Rami, Bachar et Yolla, du « oud » au piano, en passant par les percussions et le chant, ont la mélodie, les rythmes, les cadences et les notes en partage.
Aah...Aah est un titre explicite pour parler non seulement des soupirs de l’amour, mais aussi de la douleur, de l’amertume, de la force et de la volonté de vivre. Vivre dans un monde fou, à l’injustice flagrante et aux valeurs morales et sociales qui s’effilochent et s’évanouissent.

Neuf chansons, en langue arabe, pour des modulations mélancoliques. Des mélodies d’une modernité jazzy, tranchantes, syncopées. Pour chanter le Sud, le drame des déracinés, l’apparition des premiers cheveux blancs, l’exil, l’abandon, la souffrance, la vibration d’une sensualité exacerbée, le trouble devant un regard chargé de désir, la maternité... voilà une panoplie de mots soigneusement triés, choisis. Pour leur rondeur, leur caresse, leur poids, leur légèreté, leur force, leur envoûtante musicalité.
La poésie, ardente, diaphane et dense, est au rendez-vous de ce tour de chant sur platine avec Yolla Khalifé. Pour cette voix aux intonations parfois incertaines qui murmure, scande, récite et psalmodie, une palette d’émotions et de sensations. Pour sonder le pouls de la vie et épouser les pulsations les plus diverses et imprévues.

Dans un arabe finement ciselé, loin de toute facilité, vogue, complaisance, mode ou engouement, la chanteuse à la voix rauque, argentée et légèrement blessée, défend en toute sérénité ce qu’on pourrait appeler une chanson à texte, en langue arabe.
Chansons aux titres éloquents : Da3ni ahoubak (Laisse-moi t’aimer), Hina talmous (Quand tu touches) La tanzour (Ne regarde pas), Fi jinahi (Sous mes ailes), Tarhil (Voyager)... Autant d’invitations à un voyage sonore aux courbes sensuelles et tendres.

Et ce n’est guère hasard si Yolla Khalifé confie que le chant est une pratique qui l’a fascinée depuis sa plus tendre enfance. En disant qu’elle « chante pour renaître », elle lance un joyeux cri du cœur et avoue sans ambages que chanter reste pour elle une bouée de sauvetage, un refuge, une consolation, une expression vitale.

Un chant qui n’a rien à voir avec ce qui est industriel ou commercial. Pour tous ceux qui aiment le chant arabe « assil » (de tradition pure), c’est presque un moment de délassement personnel, à savourer, pour ses tonalités drues et élégamment gutturales, dans la solitude et un certain recueillement. Comme une confidence grave mais guère pesante...

(Edgar Davidian, mai 2013)

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