dimanche 19 mai 2013

Israël : le "Bedgate", ce scandale qui embarrasse Netanyahou (Danièle Kriegel)

(Benyamin Netanyahou et sa femme Sarah (photo d’illustration). © ERIC FEFERBERG / POOL / AFP )

C’est devenu le "Bedgate". Soit les 127 000 dollars dépensés par la présidence du Conseil israélien pour mettre en place une chambre avec lit double destinée à Sarah et Benyamin Netanyahou dans l’avion qui les emmenait à Londres assister aux obsèques de Margaret Thatcher.

L’affaire remonte à quelques semaines. Lorsqu’il apprend le décès de la Dame de fer, qu’il admirait tant, Netanyahou donne l’ordre de publier un appel d’offres auprès des trois compagnies aériennes israéliennes pour la location d’un avion avec chambre. C’est finalement EL AL qui l’emporte. Le Premier ministre s’envole alors avec son épouse pour la capitale britannique, où le couple séjournera un peu moins de 48 heures.

Ce que le public israélien ne sait pas encore - jusqu’au scoop de la chaîne 10 -, c’est que ce voyage aura coûté la bagatelle de 127 000 dollars, le montant exigé par EL AL pour la location de l’un de ses appareils. En effet, le chef du gouvernement a exigé l’installation à bord de l’appareil, en plus de 22 sièges de classe business, d’une vraie pièce de repos, avec quatre murs, une porte et un lit double. Le tout afin que le couple puisse dormir durant les cinq heures de vol. Or, seuls les avions de EL AL sont suffisamment larges pour pouvoir satisfaire à cette demande.

127 000 dollars pour un lit double ! La révélation a déchaîné les caricaturistes. Mais pas seulement. Les médias dans leur ensemble en ont fait leurs gros titres, entre étonnement et critiques acerbes. À l’heure de l’austérité et des coupes budgétaires, certains éditorialistes ont parlé au mieux de grosse faute de goût, au pire de "provocation royale" d’un dirigeant dont "les désirs sont des ordres". Et les explications fournies par l’entourage du Premier ministre n’ont pas arrangé les choses : Benyamin Netanyahou était parti dans la nuit, après les épuisantes cérémonies de la journée de l’indépendance, alors que dans la capitale britannique, en marge des funérailles de la Dame de fer, l’attendaient une série de rendez-vous politiques de la plus haute importance.

Au final, ses services ont dû promettre que cela ne se reproduirait plus, du moins à ce prix-là. D’autant plus que des quotidiens comme le Yediot Aharonot ont pris un malin plaisir à rappeler qu’à près de 90 ans le président de l’État, Shimon Peres, avait récemment effectué un voyage en Corée du Sud (11 heures de vol) sans exiger rien de tel.

Fin de la tornade ? Pas vraiment. Depuis quelques jours, le pays est agité par une autre affaire, liée au train de vie du couple Netanyahou et de ses deux enfants. Cette fois, c’est officiel : en quatre ans de pouvoir, les dépenses de fonctionnement de la résidence du chef du gouvernement sont passées de 1,892 millions de shekels (environ 402 000 euros) en 2009 à 3,291millions (environ 700 000 euros) en 2012. Une augmentation de 73 % qui concerne tous les chapitres budgétaires : nourriture, réception, nettoyage, maintenance, jardinage, etc.

Mais ce qui provoque les commentaires les plus âpres, c’est le manque de transparence dans les dépenses. Il aura fallu plus de trois mois à une étudiante en droit, Orian Weitzman, pour obtenir un montant détaillé de ces frais. Toutes ses demandes auprès des autorités avaient été laissées sans suite. Pas découragée et avec l’aide du Mouvement pour le droit à l’information du public, elle a fait appel à la justice, qui lui a donné satisfaction. "Une longue marche" qu’elle déplore, "alors qu’aujourd’hui, dans de nombreux pays, il suffit d’un clic sur Internet pour connaître la destination de chaque dollar ou euro dépensé par l’État".

(17-05-2013 - Danièle Kriegel)

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