jeudi 10 janvier 2013

Arabie Saoudite : A 82 ans, le "prince rouge" est l’inlassable défenseur des réformes en Arabie

A 82 ans, le prince libéral Talal Ben Abdel Aziz, dit "le prince rouge", père du milliardaire Walid ben Talal et inlassable défenseur des réformes politiques en Arabie saoudite, réclame le droit de conduire pour les femmes dans le royaume ultraconservateur.
Dans une interview accordée à l’AFP, ce demi-frère du roi Abdallah, qui avait gagné dans sa jeunesse le surnom de "prince rouge" pour avoir osé défier la famille royale, estime qu’en attendant la tenue d’élections dans le royaume, il est nécessaire "de donner des pouvoirs au conseil consultatif".
"Jusqu’à la tenue, Inchallah (si Dieu le veut), d’élections, il faut accorder des prérogatives au conseil de la Choura : il doit pouvoir légiférer, approuver le budget et auditionner" les responsables, dit-il.
L’Arabie saoudite n’a pas de Parlement mais un Conseil de la Choura de 150 membres désignés, par le roi, une instance purement consultative.
Le royaume a organisé des élections municipales à deux reprises et les femmes vont participer au prochain scrutin en 2014, par décision du roi, un prudent réformateur, âgé de 89 ans.
Le prince Talal a rendu hommage à son demi-frère, le qualifiant "d’homme de réformes", et exprimé l’espoir que "Dieu lui accorde une longue vie afin qu’il accélère le processus de réformes politiques et sociales".
L’âge du roi Abdallah et sa santé déclinante -il a été hospitalisé pendant près d’un mois en novembre et décembre derniers- alimentent régulièrement les rumeurs sur l’avenir de la direction du royaume, acteur-clé au Moyen-Orient et premier exportateur mondial de pétrole brut.
Le prince Talal avait annoncé en novembre 2011 sa démission du "Conseil d’allégeance" qui regroupe 36 princes et est en charge de la succession au sein de la dynastie des Al-Saoud.
Sa démission était intervenue peu après la nomination de son demi-frère, Nayef comme prince héritier à la mort du prince Sultan. Le prince Nayef est décédé à son tour en juin 2012 et son frère Salmane lui a succédé, le pouvoir se transmettant entre fils du roi Abdel Aziz, fondateur du royaume.
Le prince Talal peut difficilement prétendre lui-même à la succession, étant de mère non saoudienne.
Interrogé sur la situation des femmes dans le royaume, unique pays au monde où elles sont privées du droit de conduire, le prince Talal a estimé que "cette question est lassante (...) les bédouines conduisent bien leurs voitures dans les campagnes, pourquoi les femmes sont-elles toujours privées de le faire en ville ?".
Il a souligné que beaucoup de familles saoudiennes sont contraintes de "s’endetter pour payer un chauffeur" étranger.
"Ceux qui disent que la mixité et la conduite pour la femme sont illicites estiment-il logique de permettre à un chauffeur de rester dans les maisons jour et nuit ?", a-t-il lancé dans une critique aux religieux.
Des militantes avaient lancé en juin 2011 une campagne pour braver cette interdiction, et plusieurs d’entre elles ont été forcées par la police à signer un engagement à ne plus récidiver.
Le prince Talal a par ailleurs appelé à la création d’un Fond souverain, à l’instar des autres pays du Golfe, dans le royaume qui avait annoncé un excédent budgétaire de 102,9 milliards de dollars en 2012, grâce notamment à la hausse des prix du brut.
Ce fond "indépendant du gouvernement" devrait recueillir "l’excédent budgétaire chaque année", a-t-il dit, en prévision de l’après-pétrole.
"Le pétrole peut se tarir, mais il y a aussi des substituts qui apparaissent sur les marchés, et nous craignons qu’un jour la demande baisse sur le brut" a-t-il ajouté.
Le prince Talal préside le Programme arabe du Golfe pour les organismes de développement des Nations Unies (AGFUND), chargé de promouvoir l’éducation et la santé dans les pays en développement.
Né en 1931, il avait constitué au début des années 1960, sous l’influence de l’Egypte nassérienne, le "Mouvement des princes libres" qui avait réclamé des réformes de fond en Arabie saoudite.

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